10/05/07

 

A UMRED, EN INDE: ÉMEUTE DES USAGERS DE L'ÉLECTRICITÉ


En février dernier, des émeutes ont éclaté dans la ville d'Umred, située au centre de l'Inde, dans l'État de Maharashtra, dont la ville la plus connue est Mumbai, ou Bombay. Les immeubles de l'administration ont été lapidés, des véhicules de police incendiés. La police a répliqué par des tirs à balles réelles. Bilan: deux morts.
Motif: les usagers ne supportent plus que l'électricité soit coupée entre 8 heures et 12 heures par jour.
Pour comprendre la crise, il faut savoir qu'en Inde, la gestion du service public de l'électricité relève de la compétence des États.
Jusqu'à ces dernières années, pas de problème dans l'État de Maharashtra. Et puis, la croissance a "explosé". Les besoins sont montés en flèche, et comme le gouvernement local n'a pas fait son travail, la fourniture de courant n'a pas suivi. Pénurie.
Sauf que la pénurie n'est pas la même pour tous. A Bombay, l'élite qui profite de la croissance économique peste quand la climatisation s'arrête pendant 90 minutes en été.
Dans les petites villes et les villages, où vivent 70% du milliard d'habitants de l'Inde, ce sont les écoliers qui souffrent: ils ne peuvent pas faire leurs devoirs. Au cours de leur manifestation de février, les parents d'élèves ont d'ailleurs réclamé qu'il n'y ait pas de coupures de courant pendant les examens dont le résultat conditionne l'avenir de leurs enfants.
C'est en effet une caractéristique de cette région proche de Bombay. La prospérité est à portée de la main, dans les bureaux et les usines de la métropole. Mais pour y accéder, il faut des diplômes. Les enfants ont la rage d'étudier, et si on les en empêche faute d'élecrticité, ils sont révoltés.
Sushrut Lanjewar a huit ans. Le soir, pas facile de faire ses devoirs à la chandelle. La lumière "sautille", il a du mal à lire. Et comme le ventilateur ne tourne pas, il est harcelé par les moustiques.
"Incroyable, dit-il. les adultes me disent que je dois étudier. Et quand je veux étudier, ils coupent l'électricité!"
Le journaliste lui explique qu'à Bombay, les élèves ont l'électricité pratiquement 24 heures sur 24. "Si c'est possible pour eux, pourquoi pas pour moi?"
Son oncle Abhay connaît la réponse: "A Bombay, ce sont des êtres humains. Ici, nous ne sommes que des animaux!"


(source: le quotidien "The International Herald Tribune" des 5-6 mai 2007)