Article du Journal de Saône et Loire (21/02/09)

"Leur maison mise aux enchères pour une dette minime "

"Pour avoir laissé traîner pendant plusieurs années une dette modeste, la maison de M. et Mme Bon a été vendue aux enchères. Menacés d'expulsion, ils refusent de quitter les lieux.
Nous venions de finir de payer notre maison que nous avions fait construire en 1981 quand nous avons commencé à avoir des ennuis. Nous n'avons jamais pu en profiter. » Entre deux sanglots qui lui nouent la gorge, Renée Bon raconte son cauchemar avec difficulté, mélangeant parfois les dates et les étapes de sa descente aux enfers. Tout aurait commencé en 2000 quand le mari de Renée, artisan de son état, contracte une dette auprès d'un fournisseur de matériaux. Il doit 3 000 €, une somme qu'il ne pourra jamais payer. « On a commencé à voir les huissiers en 2001. Mais on n'a pas compris. Ils devaient nous prendre nos meubles pour rembourser, on a dit tant pis. » Sauf que les époux Bon ont vraisemblablement confondu « saisie immobilière » avec « saisie du mobilier ». Ils n'ont pas donné suite aux courriers, aux sommations… Et se retrouvent sans maison dès le 13 mai 2003, date à laquelle leur bien (maison et terrain) a été vendu aux enchères pour 8 010 €. Depuis, Renée et François Bon ont bien tenté de faire appel. Ils ont été déboutés.
Prêts à « tout démolir »;
Plusieurs courriers les somment de quitter les lieux, mais les Bon campent sur leurs positions. Des positions bien fragiles, si l'on tient compte des négligences de la famille, commises sans doute par ignorance et incompréhension : « Nous n'avons pas osé le dire à nos enfants. De toute façon, ils n'auraient pas les moyens de nous aider. » Les larmes ressurgissent à l'idée de devoir quitter les lieux : « Ça fait 30 ans qu'on habite là. Avec mon mari, nous sommes prêts à tout démolir et à nous suicider ensuite. » La démolition a d'ailleurs déjà commencé, l'habitation est plutôt dégradée : « Nous n'avons pas le moral pour entretenir une maison qui n'est plus à nous. Moi je ne dors plus, j'ai des crises d'angoisse. Cette maison, c'est notre vie. Nous ne voulons pas partir. »

Un prix dérisoire;
La famille a écrit par deux fois au président de la République. En désespoir de cause, Renée Bon a saisi la Fédération des usagers des transports et des services publics. Et c'est Jean-Claude Delarue, le secrétaire général de l'association, qui s'est emparé de ce cas, exaspéré par la situation : « Qu'une maison achetée 600 000 francs il y a 20 ans parte aux enchères à 8 010 € alors que la mise à prix était à 8 000 € ça pose problème et ce n'est pas un prix normal. Surtout pour une dette qui se monterait à 3 000 €. Ces gens auraient dû être conseillés. Il va falloir que nous réagissions. » Et Jean-Claude Delarue d'évoquer l'éventuelle création d'un comité de soutien. Relogement;
De son côté, le maire de Saint-Maurice-en-Rivière est tout à fait au courant du dossier : « Nous avons fait ce qu'il fallait, nous avons rencontré le sous-préfet plusieurs fois, alerté les assistantes sociales et le Conseil général. Le problème, c'est que les époux Bon n'ont pas bougé avant la vente de leur maison. La commune aurait pu, dans la mesure de ses moyens, les aider à acquitter leur dette. Pour l'instant, nous n'avons pas de solution de relogement pour eux. Notre commune n'a que 400 habitants. » Le 15 mars marque la fin de la trêve hivernale. Les expulsions locatives pourront reprendre. La famille Bon sera-t-elle sur la liste ? Tout dépend du sous-préfet. Il faut savoir que, tous les ans, dans l'arrondissement de Chalon 10 à 20 expulsions deviennent effectives.
Valérie Monin"